Prendre les documents d’archives par la main, c’est une façon de parler. C’est aussi une façon de dialoguer avec l’histoire. Les images conçues pour l’exposition sont une relecture à l’aune du présent, avec toute le part de subjectivité que les historiens cherchent à éviter mais que l’artiste peut assumer par un parti-pris volontairement anachronique ou par des raccourcis formels. J’interroge les documents et je dessine en écho une image qui engage le présent, en interrogeant le rôle des femmes, l’austérité protestante ou le dialogue œcuménique.
A chaque fois ce que j’ai mis en scène est à rapporter au présent et non à une réalité historique. Pour exemple, dans une image que je n’ai justement pas construite – et qui parle ainsi mezzo voce – cette vue du monument Michel Servet (panneau 17) : la veilleuse et les fleurs sont d’aujourd’hui, le monument est de 2011, la stèle de 1903, le bûcher de 1553. En conjuguant ces quatre moments à partir du présent, l’image témoigne des formes de pensées et de compassions modernes autour de ce moment de crise.
Chacune des images recèle (si elle peut, car c’est à vous d’en compléter les possibles) un feuilletage de temporalités, une interrogation sur l’événement, une question sur les expressions historiques ou actuelles de la foi.
L’archive est cet outil formidable qui permet de tamiser nos présupposés et freine ce que le cliché, le parti pris, l’idéologie viendrait amalgamer ou trancher. En tamisant ce matériau inédit pour moi, j’ai trouvé quelques pépites qui m’ont servi à élaborer un pas de côté dans la fabrication des images.